Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Les bonnes feuilles de Vent d'Auvergne
5 juin 2006

Perspectives rétro

poing_et_roseL'année 2006 s'avère dès maintenant une année riche en rétrospectives, en rétrospectives socialistes en tout cas.

Et oui, 2006 c'est le soixante-dixième anniversaire du Front Populaire qui n'est plus synonyme que des congés payés. Cet événement historique, comme beaucoup d'autres, est devenu un mythe, une belle légende. Tout de suite est évoquée une joyeuse cohue populaire de cyclistes allant en direction de la mer située à quelques dizaines de kilomètres et qu'ils n'avaient jamais vue..., l'espoir et la joie offerts aux classes laborieuses... Voilà le thème des rétrospectives en ce début d'année, et la ville de Clermont-Ferrand, après avoir commémoré l'anarchiste Louise MICHEL, préférée à l'Abbé DELILLE ou à la vieille famille auvergnate des MONTMORIN SAINT-HEREM, ne pouvait oublier cet anniversaire.

Oubliée donc la paralysie du pays, alors même que Léon BLUM était Président du Conseil, oublié le marasme économique qui s'en suivit, oubliée l'absence de réaction de la France face à la menace totalitaire fasciste et communiste. Je crois que pour juger d'une période historique, il faut juger, non des bons sentiments prodigués, mais des résultats et apports de la période. Les résultats furent calamiteux avec une des périodes les plus noires qu'allait connaître la France et les apports anecdotiques, réduits à ces quelques souvenirs à bicyclette.

L'autre grande expérience socialiste, déjà entrée dans la légende, celle de 1981, est en tout point semblable, comme l'avait prédit Raymond ARON, contemporain du Front Populaire et spectateur des prémisses du mandat de F. MITTERRAND. 2006 sera également l'année d'une rétrospective sur 1981, vingt-cinq ans après. Il s'agit du programme économique du Parti socialiste. Je citerai Pierre MAUROY qui disait que « le programme de 1981 était un programme de 1970, basé sur des idées de 1960 ». Le programme socialiste pour 2007 a donc, selon MAUROY, près de cinquante ans... Mais qu'y a-t-il dans ce programme ? De vraies mesures socialistes.

Tout d'abord, on annonce que l'on reviendra sur toutes les lois promulguées par les gouvernements Raffarin et De Villepin. Moi qui les trouvais fades avec leurs demi-mesures floues sur les retraites, la santé, l'emploi, et inexistantes pour l'éducation, je reste ébahi. Comment le problème des retraites, reconnu depuis bientôt vingt ans par la Droite et la Gauche (livre blanc de 1988 sous M. Rocard), reposant sur un point aussi objectif que la démographie, où une inégalité manifeste subsiste encore entre le privé et le public, peut faire l'objet d'un retour en arrière, alors que si peu a été fait en avant ?

Ensuite, les propositions. La plus caricaturale, la plus démagogue, la plus éhontée est celle du SMIC à 1500 € à la fin de la mandature, soit 2012 (sauf s'ils reviennent aussi sur le quinquennat !). Alors que l'inflation est quasi nulle (sauf quant à l'immobilier qui culmine avant sa chute prochaine), on parle d'une augmentation d'environ 50 %. Les socialistes sont rarement de fervents croyants. Là, ils font mieux, se prenant pour Jésus multipliant les pains.

Mon grand-père est agriculteur, j'ai grandi à la campagne et j'aime à prendre exemple dans la nature pour raisonner. Un salaire, c'est une partie de la richesse produite qui est versée aux salariés, rétribuant leur travail et, aujourd'hui, c'est entre 70 et 80 % de la richesse (le terme économique est la valeur ajoutée) qui va aux salaires au sens large (cotisations sociales comprises). La production d'un champ de blé dépend des aléas de la nature, de la richesse du sol, des efforts et soins de l'agriculteur, en fait, elle dépend de beaucoup de choses sauf d'un texte législatif ou réglementaire. Augmenter de 50 % l'ensemble des rémunérations (car si on augmente le SMIC, les autres rémunérations suivent, ou alors autant, si l'on veut être salarié, ne plus faire d'études…), ce serait donner près ou plus de 100 % de la richesse aux salaires, ce qui n'est pas viable. Il est de bon sens de penser que la rémunération des salariés est en partie fonction de leur productivité, tout comme il faut augmenter la production du champ de blé de l'agriculteur pour qu'il dispose de plus de grains. Et cela est possible, c'est le sens de l'Histoire. L'Homme invente, améliore, et le progrès nous permet de faire plus, mieux et avec moins d'effort. C'est le réel moteur de l'économie et du niveau de vie. Si l'on me dit que non, que c'est le politique qui règle le sens de l'économie, j'inviterai mes contradicteurs à appliquer le SMIC à 1500 € en Bolivie, en passe de devenir un nouveau pays de cocagne socialiste.

Offrir un SMIC à 1500 euros, est-ce impossible ? Vous pouvez répondre que non à la vue de mon précédent argumentaire. Et bien je vous répondrai que c'est possible. 3000 euros, même pour le SMIC, je peux le faire. Mais il faut savoir de quoi nous parlons. Parlons-nous de salaire, de quantité de billets de vingt euros reçus par un salarié, ou de son pouvoir d'achat ? Les socialistes ne peuvent promettre que des quantités de billets. Et à quoi vous servent les billets ? Cela ne se mange pas, ce n'est pas divertissant à regarder, cela ne sert qu'à une chose : à échanger. A échanger contre des biens et services, et un prix permet de faire la conversion des billets en produits, c’est ce prix qui est crucial et dont dépend le niveau de vie.

Imaginons un pays fermé comme l'imagine ou le veut une bonne partie des socialistes (même au temps de la Gaule romaine, les échanges étaient significatifs...). Tous les salaires augmentent de 50 %, le mien passe de 100 à 150. J'achète quotidiennement mon pain qui valait 1. Pour fabriquer ce pain, le boulanger dépensait 0,8 en salaires. Ces salaires vont passer, après augmentation, à 1,2 (noter que l'on dépasse déjà le prix habituel du pain). Mais le pain est fait à partir de farine ; pour fabriquer cette farine, il faut des salariés qui ont eux aussi été augmentés. Il faut, pour obtenir de la farine, du blé et des salariés agricoles, et ces salariés qui produisent les moissonneuses, les moulins, les engrais, tout ce qui est nécessaire au blé, ont eux aussi été augmentés. Les moissonneuses, les engrais, donc le blé, donc la farine, ont augmenté. Je récapitule : les salaires et la farine ont augmenté pour mon boulanger, mais est-ce tout ? Il loue les locaux de sa boulangerie. Les matériaux de construction, les salaires des ouvriers ont progressé, d'où une augmentation du coût de la construction et donc de ses loyers. Le résultat après tout cela est que si je gagne après la loi socialiste 150 au lieu de 100, mon pain vaut lui désormais 1,5 et tous les produits ont suivi le même chemin. Il s'agit d'un mécanisme bien connu par le passé : l'inflation.

C'est un jeu à somme nulle alors ? Oui et non, car s'il n'y a pas de richesses produites en plus, il y a des perdants et des gagnants. Les gagnants sont les personnes endettées qui voient la valeur réelle de leur dette diminuée du tiers. Une dette de 150 équivalente à 150 pains devient égale à seulement 100 pains. L'Etat est le premier gagnant à ce jeu et la mesure ne lui coûte rien. Au lieu de faire des réformes, il réduit mécaniquement son endettement. Les perdants maintenant, qui sont-ils ? Ce sont les personnes qui ont prêté à d'autres. Il s'agit des créances au sens large, les prêts mais aussi les comptes bancaires, livrets et autres placements dits monétaires ou obligataires (sauf ceux indexés sur l'inflation), mais aussi les rentes viagères (voilà un sacré coup de pouce pour les personnes âgées qui ont vendu leur maison en viager...). Alors que vous disposiez de 150 équivalent à 150 pains, vous n'aurez plus droit qu'à 100 pains ! Il faudra manger moins car les cigales ont de l'appétit. La fourmi est volée par la cigale, voilà la version socialiste de la fable de La Fontaine. Le smicard n'a rien à gagner...mais il pourrait encore y perdre.

Raisonnons maintenant dans l'économie ouverte, l'économie actuelle, celle qui nous permet d'avoir de multiples choses dans des qualités et quantités encore jamais égalées, pour un faible coût.

La loi socialiste dispose que mon salaire passe de 100 à 150. Je fabrique des voitures. Le coût de la voiture augmente mécaniquement et son prix doit suivre pour que l'entreprise survive. Si le prix augmente à l'étranger, et dans des proportions importantes, il est probable que l'on en vende moins, voire plus du tout. L'économie de marché, la vraie, a la solution. Il s'agit des taux de changes des monnaies. Notre économie n'étant pas plus forte, ne produisant pas plus le lendemain que la veille, l'inflation de 50 % entraîne une baisse du tiers du cours de notre monnaie face aux autres devises. Si le coût de la voiture passe dans notre monnaie de 1000 à 1500, la voiture vendue à l'étranger devrait toujours être vendue au même prix (1,5 (inflation de 50%) / 0,66 (baisse du tiers du cours) = 1). De même, les produits étrangers importés subiront une augmentation de 50 % en monnaie nationale.

Cependant, notre monnaie n'est plus le franc mais l'euro, l'économie de la France n'est pas celle de toute la zone euro et donc, la monnaie ne compensera pas toute l'inflation. Si l’euro subissait une baisse, elle ne serait que partielle. Alors, le résultat serait que non seulement nos produits seraient artificiellement plus chers à l'étranger avec les baisses de ventes qui s'en suivraient, mais les biens étrangers seraient en France plus compétitifs que nos produits. Le résultat à court terme serait une baisse des ventes des biens produits en France, aussi bien qu'à l'étranger. La conséquence majeure serait la faillite ou la délocalisation de bon nombre d'entreprises qui, combinées à l'absence d'implantations nouvelles en raison de notre non compétitivité, feraient flamber le chômage.

Tout le monde perdrait son emploi ? Non, pas tout le monde, les fonctionnaires seraient toujours fonctionnaires et la dette aurait été en partie réduite par l'inflation. Tous les salariés seraient au chômage ? Non, les salariés qualifiés et très qualifiés produiront toujours un montant de richesses supérieur au salaire minimum fixé par la loi socialiste. Ce serait les plus faibles, les moins qualifiés qui seraient privés de tout accès à l'emploi car, par définition, is ne seraient pas en mesure de créer un montant de richesse plus élevé que le salaire minimum socialiste. S'ils avaient été embauchés pour un salaire inférieur, ils auraient peut-être pu acquérir de l'expérience, se former, progresser, tant en salaire qu'en responsabilité. Mais la loi impose un salaire minimum. Le prix est la variable d'équilibre entre l'offre et la demande. La France, qui connaît un taux de chômage élevé, aurait un prix élevé qui se trouve dans les cas où la main d’œuvre manque...

Scénario catastrophe, économie fiction ? Non, cela s'est passé comme cela en 1981. Et encore, notre économie était moins ouverte, nous avions notre propre monnaie, mais les résultats furent si désastreux que la majorité qui avait joué à l'apprenti sorcier en 1981 changea de cap à peine quelques mois plus tard, c'est ce que l'on a appelé « le tournant de la rigueur ». Je vous laisse deviner le résultat de la même politique en 2007.

Les socialistes sont comme ces charlatans qui promettent des breuvages miracles, qui guérissent sans risques et sans efforts. C'est très tentant, on essaie allègrement. Puis, après avoir essayé vainement la solution miracle, on se retrouve avec les mêmes problèmes, sauf que l'on dispose de quelques billets en moins, que la maladie a progressé et que du temps a été perdu.

Ils sont également semblables à ce célèbre directeur de cirque dans Pinocchio, qui attire les enfants en leur promettant un pays où l'on ne travaille pas et qui regorge de bonbons. Cela ressemble étrangement à des minima sociaux alléchants ou à la baisse du temps de travail…

J'oubliais, dans Pinocchio, les enfants peu méfiants sont transformés en ânes et finissent comme attraction dans le cirque !

Ceci n'est qu'un problème économique ? Friederich Von Hayek, dans La route de la servitude, ouvrage majeur que je conseille à toutes les personnes désirant faire la lecture d'un texte fondateur court et concis, citait Hilaire BELLOC :

« Le contrôle de la production des richesses est le contrôle de la vie humaine elle-même  ». 

Florent BELON

Publicité
Publicité
Commentaires
Les bonnes feuilles de Vent d'Auvergne
Publicité
Les bonnes feuilles de Vent d'Auvergne
Archives
Publicité