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Les bonnes feuilles de Vent d'Auvergne
20 mai 2007

Les battes de la Bastille

Aux voitures brûlées ont succédé les camionnettes des vitriers, garées en double file. Quelques jours après les violents incidents du quartier de la Bastille, les stigmates des nuits d' émeutes demeurent. Rue de Lyon, devant une carcasse de moto dévorée par le feu, un groupe de "jeunes" scande en pleine journée: « Sarko nazi! Bandes de nazis! »

Tout au long de l'artère, des dizaines d ouvriers s'affairent pour réparer les vitrines des commerçants, fracassées par des impacts de pierres et de boules de pétanque. Beaucoup de boutiques sont fermées, protégées par des palissades. D'autres ont eu recours au système D pour rester ouvertes: panneaux de bois cachant les devantures brisées, scotch et ficelles pour empêcher les enseignes de s' effondrer. Des centaines de tags s'affichent sur les murs, les magasins, l'Opéra Bastille, et même jusqu'à la colonne de Juillet, symbole des Trois Glorieuses : "Sarkonazy","grève générale", "anarchie", "je baise la France", "insurrection","Bastille 1789-2007"...

Tout a commencé au soir du 6 mai. Quelques milliers d'anarchistes, de trotskistes, de militants socialistes  déçus, puis de casseurs, investissent la place de la Bastille. Refoulés par la police, ils dévastent tout sur leur passage dans les rues alentours. Et d'abord les "symboles du capitalisme" : banques et distributeurs de billets incendiés, magasins saccagés. ..Mais aussi des symboles de l'État, comme l' ANPE Voltaire, criblée d'impacts de projectiles.
Les casseurs se sont aussi mués en pilleurs. En témoigne le sac du siège de l'association La Voix de l' enfant autiste, qui vient en  aide aux enfants autistes  et à leurs familles. En plus des vitres brisées, des dossiers détruits et des meubles fracassés, tout le matériel informatique a été volé : ordinateurs, imprimantes, caméras, vidéo-projecteurs, lecteurs DVD, ainsi que le matériel destiné à l'éveil et au suivi des enfants.

«C'est une catastrophe morale et financière. Nos bénévoles ne peuvent plus travailler. Nous évaluons les dégâts à 22 700 euros. Le pire, c'est que l' assurance ne couvre pas les déprédations causées par les manifestations. Et nous ne touchons aucune aide de l'État, explique M'Hammed Sajidi, le président de l'association. Des années de travail ont été anéanties en quelques heures, c'est un coup durpour notre association. Je m'interroge, ajoute-t-il, car dans notre rue, nous sommes les seuls à avoir été touchés. Je pense que nous avons été visés par des gens organisés. Ce vol a certainement été prémédité. » Coïncidence ? Quelques  jours plus tard, un autre local de La Voix de l'enfant autiste a été couvert de signes sataniques…

« Dans les cinq dernières semaines, les ventes de boules de pétanque ont augmenté de 70 % en région parisienne par rapport à l' année dernière, à la même période, constate Philippe Dourcy,  responsable de la communication des magasins de sport Décathlon. Avec une telle augmentation, on peut présumer que leur utilisation n'a pas été seulement sportive. ..» Idem pour les battes de base-ball, clubs de golf et crosses de hockey, dont les ventes se sont envolées !
C'est dans la rue de Lyon que les dégâts sont les plus impressionnants. L'Opéra Bastille est tagué d'une prose peu poétique. Ses vitres explosées. Plus loin, des vandales se sont acharnés sur les baies vitrées d'une concession Peugeot. « Ils ont vraisemblablement tenté de s'introduire dans le magasin, mais en vain », explique Arthur, commercial, les yeux rivés sur les dizaines d'impacts de projectiles criblant la vitrine. Cafés, banques, boulangeries, salons de coiffure, et même sex -shops, tous ont subi "la colère" des manifestants.
A la Grande Pharmacie du Départ, des photos, souvenirs du saccage, sont affichées aux murs. Dans la nuit du 6 au 7, des pilleurs se sont attaqués à l'officine, volant et détruisant tout sur leur passage. Les photographies prises par le pharmacien sont apocalyptiques : boîtes de médicaments, bris de verre, pilules déversées par milliers dans le caniveau, au milieu de voitures renversées ou incendiées. Un champ de bataille. « Je suis arrivé sur les lieux à une heure du matin, prévenu par un voisin, relate Francis, le propriétaire de la pharmacie. J'ai alors découvert mon officine détruite, les médicaments déversés dans la rue, les placards et les présentoirs à terre, les écrans volés, mon imprimante explosée…Ils se sont introduits dans la pharmacie et ont absolument tout saccagé. »

Ce pillage a été filmé par des équipes de télévision. Il a été visionné par des milliers d'internautes sur le site daily-motion. « Il y a eu plusieurs vagues: la première constituée de manifestants et de badauds. Puis une vague de casseurs qui a ouvert la voie à des pilleurs parfaitement organisés. J'ai bien peur que cette manifestation n'ait été qu'un prétexte. »Bilan : 10 000 euros rien qu'en miroiterie et 6 000 pour remplacer le matériel informatique. Quant aux médicaments volés, déversés ou inutiliables, le désastre est tel que Francis ne parvient toujours pas à le chiffrer. A l'image des commerçants pris pour cible,il va devoir tout reconstruire.

CECILE MORTREUIL

“Les anars se sont fâchés, ça a pas mal frité”

« Pour les sans-papiers, contre Sarko et le Medef, il faut être là ! On va bloquer les facs une par une. » « Appel à manifester le 16 mai lors du sacre de Sarko ! » Les étudiants d’extrême gauche n’ont pas attendu longtemps, après la victoire de Nicolas Sarkozy, pour montrer leur visage contestataire et violent. L’occupation de la faculté de Tolbiac a tourné court, mais elle a donné lieu à plusieurs incidents. « Ça a pas mal frité. Certains jeunes voulaient passer leurs examens. Alors, les anars de la CNT se sont fâchés. C’était sporadique, mais ça a tapé », assure Charles, agent de sécurité, une main sur la grille et les clés dans l’autre.

Le 10 mai, le site universitaire de Tolbiac (XIIIe arrondissement de Paris) est fermé pour la journée par décision de la présidence de l’université de Paris-I. La veille, quelques échauffourées ont eu lieu et, la nuit même, une poignée d’étudiants a campé sur place pour bloquer l’accès. Sur les lieux, seul l’amphi N est encore accessible. Une centaine d’irréductibles y tient une assemblée générale pour essayer d’organiser le mouvement naissant. Sur les murs, une banderole : “La fac n’est pas à vendre”. Les étudiants assis sur les tables essaient de débattre en fumant des joints. La Fédération syndicale étudiante (FSE) appelle à une manifestation digne du CPE, tout en sachant que ni l’Unef ni les partis de gauche ne soutiendront cette action. La plupart des étudiants se méfient de la presse et les caméras sont priées de sortir : « Médias, collabos ! » Certains, moins radicaux, sont venus pour voter la reprise des examens. Ils condamnent la violence qui a cours dans l’établissement. « Les anars sont souvent à Tolbiac. Ce sont toujours les mêmes, rarement des étudiants d’ailleurs. Le président de Paris-I a l’habitude. Il a bien fait de tout fermer, ça évite plus de violence », estime Romain, 23 ans.
Dehors, les agents de sécurité déplorent les dégâts : « Pour l’instant, c’est kif-kif avec le CPE. Il y a des chaises un peu partout, beaucoup de graffitis… Par contre, il n’y a pas eu de jets de pierres comme l’année dernière. Ça va vite s’essouffler leur truc. C’est juste une petite crise passionnelle contre Sarkozy. Ils font trop de cauchemars, ces gosses ! », conclut Julien. Bien vu : dès le 11 mai, les examens reprennent après un vote à main levée. Pour les “anars”, ce n’est que partie remise. 

Ces articles sont tirés du site du magazine Valeurs actuelles. Pour retrouver le second:
http://www.valeursactuelles.com/magazine/france/index.php?num=3677&position=4&nb=5

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